L'étude est le fruit d'une initiative du Conseil des relations interculturelles, en collaboration avec la Chambre de commerce du Montréal métropolitain et le ministère de l'Immigration et des Communautés culturelles.
(Source : leaffaires.com)
Cette enquête s'appuie sur un sondage téléphonique effectué auprès de représentants d'entreprises de différentes tailles et de toutes les régions de la province. Entre juin 2007 et novembre 2008, 1 372 entreprises ont été sollicitées et leur taux de réponse a été de 25,5 %.
Ainsi, on constate que la majorité des entreprises sondées n'ont recours à aucune pratique de gestion de la diversité ethnoculturelle. Les taux d'utilisation des six pratiques les plus populaires varient, en moyenne, de 15,1 % à 32,3 % seulement.
Ces résultats varient en fonction des pratiques, du secteur d'activité des entreprises, des régions où elles se trouvent et de leur taille, les plus grandes entreprises ayant tendance à être mieux outillées que les petites.
"Globalement, les entreprises québécoises ne sont pas fermées à l'idée de changer leurs méthodes. Elles sont même plutôt ouvertes à l'intégration de nouvelles pratiques, affirme Patricia Rimok, présidente du Conseil des relations interculturelles.
"Mais il reste encore énormément à faire, particulièrement chez les PME", ajoute Mme Rimok.
Flexibilité dans l'octroi des congés
La pratique la plus utilisée concerne la flexibilité des congés pour des raisons religieuses. Cette pratique est utilisée par près du tiers (32,3 %) des entreprises sondées (37 % des moyennes et grandes entreprises).
La deuxième pratique courante est la participation à des événements liés à la diversité. Or, seulement le cinquième des entreprises (20,1 %) y ont recours.
Le recours à des interprètes internes, l'utilisation de matériel promouvant la diversité et l'offre de cours de français sur les lieux du travail sont des pratiques utilisées à peu près également par l'ensemble de l'échantillon, soit environ 15 %.
Efficacité reconnue
Ces résultats surprennent. D'autant plus que la majorité des entreprises sondées ont jugé les pratiques de gestion de la diversité efficaces pour améliorer le climat de travail.
On remarque, par exemple, que le recours à des interprètes internes et à différents types de formation (mise à niveau des qualifications des employés appartenant à des minorités ethniques ou formation de sensibilisation à la diversité pour tous les salariés) sont jugées efficaces, respectivement, par 90,4 % et 86 % des répondants.
La pratique la plus populaire auprès des employeurs (flexibilité dans l'octroi de congés pour des raison religieuses) est jugée efficace par près de 80 % des répondants.
Paradoxe et faible coût
D'autres pratiques sont également jugées efficaces, mais sont paradoxalement très peu utilisées.
C'est le cas de la traduction de documents destinés aux nouveaux employés. Cette pratique recueille 80 % d'appui, alors que seulement 5,7 % des répondants le font.
Il existe un écart important entre le discours d'ouverture et la pratique, constate la présidente du Conseil des relations interculturelles.
D'autant plus que les pratiques liées à la diversité en entreprises sont peu coûteuses. Moins du tiers des entreprises sondées affirment avoir dû absorber des dépenses supplémentaires liées à la gestion de la diversité.
Les dépenses les plus importantes découlent de la révision de leurs pratiques afin qu'elles ne soient pas jugées discriminatoires et au temps consacré à gérer ce dossier.
L'INTÉGRATION, UNE PRIORITÉ POUR LES EMPLOYEURS
Il ne suffit pas d'embaucher un travailleur immigrant pour que l'expérience soit réussie.
Penser l'embaucher sans se soucier de son intégration est plus ou moins voué à l'échec, soutient Robert Vyncke, président du Groupe Conseil Continuum, à Montréal. "La pire des choses est de se fier à la seule capacité d'adaptation du nouveau venu. Ou encore de croire qu'à la longue, à force d'observer ses collègues et de se débrouiller, il arrivera à déployer tout de son talent. C'est une grave erreur !"
Fournir des explications détaillées
L'intégration réussie d'employés d'autres origines est un processus complexe, qui exigera de l'entreprise qu'elle fournisse des efforts. Comme pour tout nouvel employé, mais davantage lorsqu'il s'agit d'un immigrant, la direction doit prendre le temps de le recevoir en bonne et due forme.
Lors de cette première rencontre, la direction prendra soin d'expliquer à l'employé ses tâches, les horaires, la tenue vestimentaire souhaitée, les pratiques acceptables ou non à l'intérieur de l'entreprise. Aucun détail n'est de trop. Ainsi, si les plats au poisson ou les dîners épicés au cari sont susceptibles d'être mal accueillis à la caféteria, le nouvel employé doit en être informé dès le départ.
Il en va de même de détails qu'on penserait aller de soi, comme l'importance que l'entreprise accorde à la prise d'initiatives personnelles, à la participation à des comités de travail, aux activités sociales organisées par l'employeur ou au simple droit d'émettre son opinion lorsqu'elle est demandée en réunion.
"Il y a des pays, en Roumanie par exemple, où les initiatives personnelles et la participation à des réunions sont découragées chez les travailleurs", dit M. Vyncke, un spécialiste des questions d'intégration.
Ainsi, le temps qu'un employeur consacre à expliquer ces évidences font la différence entre l'échec et la réussite de l'intégration à un nouveau milieu de travail.
Préparer l'accueil des nouveaux venus
L'intégration d'un employé, à plus forte raison d'origine étrangère, dépend aussi du groupe majoritaire. Cet élément est souvent négligé par les employeurs.
Les épisodes malheureux où des équipes de travail ont mal réagi à l'embauche d'employés d'origine différente sont légion. Ces épisodes se produisent souvent parce que l'employeur a négligé de bien préparer son équipe à l'arrivée du nouveau venu.
"Les préjugés sont omniprésents, aussi bien en région qu'à Montréal, où les gens sont pourtant habitués à côtoyer des citoyens d'origines diverses, explique M. Vyncke. Parfois, les préjugés sont attribuables à l'ignorance de Québécois d'origine, mais parfois aussi de travailleurs immigrants dont l'histoire du pays d'origine est marquée par des conflits, ethniques ou politiques, avec des citoyens d'autres provenances."
Il importe donc d'annoncer l'arrivée de la personne, de prévenir les employés de ses différences et ressemblances (origine, langue, couleur, etc.), et de répondre aux craintes et interrogations afin d'éviter toute réaction qui pourrait nuire à son intégration.
Nommer une personne responsable du nouveau venu à laquelle ce dernier peut s'adresser pour toute question d'ordre professionnel, culturel ou personnel, est également une stratégie fort efficace.
La pensée magique selon laquelle tout le monde apprend sur le tas ne tient pas, insiste Robert Vyncke. "L'humain n'est pas une machine qu'il suffit de brancher dans un nouvel environnement pour qu'il se remette à fonctionner !"
martin.jolicoeur@transcontinental.ca