OUTRE-MER - Au 9e jour de grève générale contre «la vie chère», un autre conflit émaille l'île: la polémique autour des békés, descendants des colons blancs, après un documentaire de Canal+…
Dans le reportage, Alain Huygues-Despointes, un entrepreneur béké fortuné qui domine l'industrie agro-alimentaire locale, expliquait «vouloir préserver sa race». «Quand je vois des familles métissées avec des Blancs et des Noirs, les enfants naissent de couleurs différentes, il n'y a pas d'harmonie», argumentait-il face à la caméra.
La polémique n’a pas attendu la diffusion du film pour prendre. Patrick Karam, délégué interministériel pour l’Egalité des chances des Français d’outre-mer, l’a dénoncé dès le 29 janvier et plusieurs sites martiniquais l’ont critiqué dans la foulée.
Depuis vendredi, le soufflé a littéralement explosé. Les habitants de l’île réagissent en nombre. Quelquefois, avec violence. A tel point que des gendarmes ont été déployés au Cap Est, la zone de résidence d'une importante partie des békés, après des appels au boycott, circulant sur Internet et par SMS, des produits commercialisés par leurs enseignes. «La Martinique est à nous, la Martinique c'est pas à eux», indique l'un des slogans des manifestants qui campent toute la journée sous les fenêtres de la préfecture, promettant à cette «bande de profiteurs et voleurs» de «les mettre dehors».
Les békés se désolidarisent des propos
Dès le 2 février, Alain Huygues-Despointes a «regretté», dans un communiqué, que ses propos aient pu «blesser». Il précise qu’ils ont été «sortis de leur contexte» et qu'ils ne reflétaient «en rien ses convictions profondes» sur l'esclavage, «un passé honni». Pour autant, Yves Jégo, le secrétaire d'Etat à l'Outre-mer, a jugé «parfaitement ignobles» ces propos, ajoutant que le parquet de Fort-de-France a cependant ouvert une information judiciaire pour «apologie de crime contre l'humanité et incitation à la haine raciale».
Dans des tribunes publiées ce mercredi dans «France Antilles», deux membres de la famille Hayot, une autre famille békée, se désolidarisent totalement des déclarations d’Alain Huygues-Despointes, affirmant ne pas «se reconnaître dans ce qui a été dit».
Le préfet de Martinique, Ange Mancini, qui préside les négociations en pleine grève générale sur l'île, a même annoncé qu'il quittait son logement appartenant à la famille d’Alain Huygues-Despointes. Il logeait chez l’entrepreneur pour cause de travaux dans sa résidence habituelle, fortement endommagée par le passage du cyclone Dean en août 2007.
Parodie du documentaire
Patrick Lozès, président du Cran (Conseil représentatif des associations noires de France) et blogueur sur 20minutes.fr, est catégorique: «Il sera désormais impossible à la France métropolitaine d’ignorer ce que dénoncent depuis 161 ans (excusez-du peu) nos compatriotes de l’outre-mer: une discrimination quotidienne basée sur la couleur de la peau, des conséquences du passé esclavagiste que nous évitons collectivement de regarder avec courage, un implacable communautarisme blanc.»
Sur Internet, des Martiniquais ont cependant choisi de traiter cette polémique par l'humour. Le site d’information Bondamanjak, au ton toujours satirique, a mis en ligne une vidéo intitulée «Welcome to Cap-Est», parodiant «Les Derniers Maîtres de la Martinique ». Les réalisateurs, de Bobi productions, mixent des images tirées du documentaire sur les conditions de vie de certains Martiniquais et des vidéos paradisiaques de l’île sur fond de musique rythmée et de doublages ironiques.
Manifestation le 12 février 2008 à Fort-de-France/Thomas Coex AFP
Les békés. Vous ne connaissiez peut-être pas ce nom. Impossible, aujourd’hui, de passer à côté. Ce sont des Créoles blancs, descendants d'esclavagistes qui avaient colonisé
Dans le reportage, Alain Huygues-Despointes, un entrepreneur béké fortuné qui domine l'industrie agro-alimentaire locale, expliquait «vouloir préserver sa race». «Quand je vois des familles métissées avec des Blancs et des Noirs, les enfants naissent de couleurs différentes, il n'y a pas d'harmonie», argumentait-il face à la caméra.
Les békés se désolidarisent des propos
A G. (avec agence)
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