jeudi 15 juillet 2010
[GABON] Tenue correcte exigée dans les administrations (Courrier International)
Un récent décret oblige les fonctionnaires et les usagers des services publics à porter une tenue vestimentaire décente. Reste à savoir si tout le monde peut se l’offrir et si les priorités ne sont pas ailleurs.
n Conseil des ministres, les autorités gabonaises viennent de s’engager par décret sur la voie d’une mini-révolution. L’accès aux services publics est désormais subordonné à une “tenue correcte”, qui commence par le port de chaussures de ville. Les autorités s’attaquent ainsi aux mœurs des fonctionnaires et des usagers de l’administration publique, en instaurant un code vestimentaire : port du costume, de l’ensemble tailleur, de la veste, du boubou cérémonieux ou de la saharienne pour les hommes. Robe, ensemble pagne, tailleur-jupe, tailleur-pantalon, boubou cérémonieux ou simple jupe chez les femmes. Si le chemisier de ces dames est toujours toléré, il ne doit en revanche plus être décolleté.
On ne verra donc plus, dans les services publics, ces décolletés à vous couper le souffle dont on se demandait s’ils étaient portés pour séduire le patron ou un collègue ! Une chose est sûre, cette forme d’exhibitionnisme n’améliorait en rien la qualité de service attendue par les usagers… On peut considérer que la gent féminine est davantage visée par cette mesure. Ces dernières années, le continent africain vit comme une épidémie la recrudescence du port de tenues courtes, voire très courtes, adopté par les femmes – une mode importée par le biais des séries télévisées latino-américaines.
La décision du Conseil des ministres concernant l’habillement est plutôt courageuse. Mais le fait qu’elle frappe indifféremment fonctionnaires et citoyen ordinaires risque de créer quelques problèmes, notamment dans les provinces. Il ne faudrait pas que l’application stricte de cette disposition prive certains citoyens, notamment les paysans, de leur droit d’accès aux services publics. Chez les hommes, seuls les amateurs de jeans et baskets devront refaire leur garde-robe s’ils ne veulent pas être mis à l’index. C’est la seconde fois que le nouveau pouvoir de Libreville prend une décision touchant directement aux mœurs et aux habitudes des Gabonais.
La première fois, il s’agissait d’interdire l’ouverture des maquis [bars] et autres débits de boissons au-delà de 22 heures. Cette fois encore, il y aura quelques grincements de dents, mais la pilule passera. La stratégie du pouvoir, si c’en est une, relèverait cependant du divertissement et de la diversion si d’autres mesures plus profondes n’étaient pas prises. N’y a-t-il pas des problèmes plus urgents à résoudre au sein de l’administration nationale que cette question presque futile de l’habillement ? Et les conditions du travail, le matériel, la corruption ? Au-delà de l’emballage, donc, il y a la question de la qualité des services, celle du rendement et la moralité des agents. Pour être crédible, le président Ali Bongo doit apporter des réponses claires à ces questions dont la résolution aurait autrement plus d’incidences sur le développement du pays.
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