mardi 19 janvier 2010
[EXPULSION] Une Camerounaise de 65 ans malade menacée d'expulsion à Lyon (Libération)
Elle se prénomme Scolastique. Mais ses amis, en France, l'appellent plus souvent "mamie". Scolastique Zouga n'a que 65 ans, mais elle a la démarche mal assurée et les traits d'une vieille dame. Marqués par l'hépatite C qui lui a rongé le foie ces dernières années. Scolastique a une vie de vieille dame, elle habite une résidence pour personnes âgées de la Ville de Lyon. Sort peu. Ne fait pas de bruit. Se plaint de ses rhumatismes. Mais, depuis deux mois, elle n'est plus vraiment une vieille dame comme les autres. Voyant que son bilan hépatique s'améliorait cette année, la préfecture du Rhône a décidé de ne plus lui renouveler son titre de séjour, délivré à l'origine pour nécessité de soins. A 65 ans, cette camerounaise apprend à vivre avec la crainte d'une expulsion… Scolastique a quitté le Cameroun en 2001. A cause de son hépatite. "On ne pouvait pas me soigner là-bas." Elle n'a pas d'enfant, plus de famille proche. Elle vend sa maison et ses affaires, et s'envole pour la France. Pays où elle ne connaît personne. Pays dont elle ne connaît rien. "Je pensais que c'était comme en Afrique. Je croyais je n'avais qu'à demander où est l'hôpital". En fait de soins, Scolastique passe les premiers temps de sa vie en France dans la rue, à Lyon. C'est là que l'ont trouvée Catherine et Armand. Le couple est également camerounais ; ils sont originaires de la même région que Scolastique. Ils vont la prendre en charge, la mettre en contact avec les services sociaux. Scolastique sera d'abord hébergée en foyers d'urgence, puis prise en charge par l'Armée du Salut, et enfin aura une place dans une résidence sociale pour personnes âgées de la Ville de Lyon. Pendant toute ces années, elle sera suivie et soignée grâce à Médecins du Monde. Des années qui lui ont permis de devenir doucement la vieille dame qu'elle est aujourd'hui. Avec ses rhumatismes. Et ses habitudes. Scolastique voit toujours Catherine et Armand, qui vivent pas très loin de son foyer. Elle est la "mamie" de leurs enfants. Ils l'aident à remplir ses papiers administratifs quand elle a besoin. Mais face à une obligation à quitter le territoire français, ils ne peuvent pas grand chose. Catherine est inquiète. "C'est terrible pour elle. Elle n'a plus vraiment de pays. Elle n'a plus rien au Cameroun. Après toutes ces années en France, lui demander de rentrer au Cameroun, cela ne veut rien dire pour elle". Pour Scolastique, la menace d'expulsion est une peur un peu irrationnelle. Elle voit des policiers partout. Lorsque nous l'avons contactée pour cet article, elle a eu peur, pensant qu'il s'agissait d'une ruse de la préfecture pour venir l'arrêter. Son ami Armand tente sans arrêt de la rassurer. Mais la vieille dame a d'autres problèmes. Plus concrets. Et plus immédiats. Depuis son non-renouvellement de titre de séjour, elle ne bénéficie plus des minimas sociaux ni de l'aide de la CAF qui lui permettait de payer son loyer. Elle doit d'ailleurs rembourser les prestations qu'elle a touchées indûment le mois suivant la lettre de la préfecture. Les gens qui l'entourent essaient de trouver des solutions pour qu'elle puisse se débrouiller au quotidien. Scolastique mange aux Restos du coeur. La mairie de Lyon, quia eu vent de la situation, lui permet de conserver sa chambre à la maison de retraite. "Cette situation est cruelle. Nous n'avons pas vocation à expulser les gens", explique Pierre Hémon, adjoint vert aux personnes âgées. Scolastique, elle, ne comprend pas bien ce qui lui arrive. A 65 ans, elle est devenue sans-papier.
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