Pour les instances sportives, c'était la goutte de trop :
« Lorsque les deux équipes [la Juve et le Napoli, ndlr] sont rentrées au vestiaire lors de la mi-temps, des supporters de la société Juventus, placés dans le secteur nommé “Curva Sud”, ont adressé à un joueur licencié dans une autre société [Balotelli] un chant qui constitue une expression de discrimination raciale. »
On passe la suite, blabla et tralala juridique. Résultat, une partie du Stadio olimpico (la curva sud, donc) fermée le samedi 23 janvier contre la Roma. Une sanction qui s'ajoute aux 144 500 euros d'amende déjà payés par la Juventus pour des faits comparables.
C'est donc pour l'ensemble de son œuvre (pour mémoire, certains supporters de la Juve scandent depuis un petit bout de temps « Si tu sautes, Balotelli meurt » et « Il n'y a pas de nègres italiens ») que la curva sud sera fermée pour un match.
Punition hypocrite
Une chouette nouvelle qui va éliminer les racistes des stades ? En fait, c'est un poil plus compliqué que ça. Domenico Mungo, spécialiste du mouvement italien et récemment auteur de l'excellent documentaire « Ultras, nel bene e nel male », décrypte :
« Les ultras de la Juve voient désormais ces chants comme une forme de contestation envers le club plus que comme l'expression de racisme envers Balotelli. »
On a tout de même connu chantage plus habile que de crier qu'il n'y a pas de nègres italiens. Quoiqu'il en soit, les instances politiquo-footballistiques ont décidé de réagir, et de punir. Domenico étaye :
« Il est bon pour les différents gouvernements de réagir avec fermeté aux chants racistes et aux dérapages des ultras de manière hypocrite et en faisant du sensationnalisme. »
Vincenzo, membre de la curva sud « Scirea » de la Juventus : « Le racisme est sévèrement puni en Italie. Mais seulement dans les stades ».
Une société gangrénée par le racisme
C'est évidemment là que le bât blesse. Il est évident que le racisme est présent dans des stades italiens, comme il l'est dans le reste de la société italienne. Dernière preuve en date ? Les chasses à l'homme d'un autre temps qui se sont récemment déroulées à Rosarno, en Calabre. Et plutôt que de punir les coupables, on a préféré opter pour la déportation en masse des immigrés vers un centre d'accueil dans les Pouilles. Domenico poursuit :
« Je considère que le racisme dans les stades italiens est en fait l'aspect le moins tragique mais le plus provocateur de la société italienne. »
Inutile de se mentir : fermer un virage d'un stade de foot n'a pas vraiment de sens au vu du contexte actuel de l'autre côté des Alpes, où déclarations racistes et lynchages à l'ancienne sont désormais monnaies courantes.
« On peut aller dans la rue précher le lavage ethnique »
Voilà, l'Italie est un pays dont le gouvernement compte parmi ses membres un ministre de l'Intérieur, Bobo Marini, membre de la Lega Nord (un parti qui ne cache pas sa sympathie pour le fascisme) et des partisans d'Alessandra Mussolini.
La parole à Domenico Mungo, toujours :
« En Italie, on peut aller dans la rue précher le lavage ethnique contre les “nègres et les gitans”, comme le député Gentilini [lui aussi membre de la Lega Nord, ndlr] a l'habitude de le faire, on peut empêcher la lecture du “Journal d'Anne Frank” parce que jugé “gênant”, on peut envoyer des immigrés mourir dans le désert ou au milieu de la mer Méditerranée. »
Tant et si bien qu'au final, les racistes et les méchants se retrouvent tous dans les stades de football. Il fallait bien un coupable. Les ultras étaient tout désignés.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire