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dimanche 27 septembre 2009

[RUGBY] Un rugbyman de Lons-le-Saunier porte plainte pour insultes racistes (Le Progrès)

Joël Tomakpleconou a pris le temps de la réflexion  avant de se décider à porter plainte / Photo DR

Joël Tomakpleconou devrait saisir la Halde et porter plainte contre un joueur de Genlis pour des propos à caractère raciste tenus la semaine dernière en ouverture de la saison

( Source : Le Progrès)

Le CS Lédonien n'a pas été épargné pour ses débuts en Honneur le week-end dernier à Genlis. Battu au terme d'un match particulièrement viril, le CSL a également dû gérer le cas de son pilier, Joël Tomakpleconou, qui assure avoir été la cible d'insultes à caractère raciste parties de la main courante. « Le match avait débuté depuis une dizaine de minutes et pas mal de coups étaient déjà partis, raconte le joueur d'origine béninoise. Mon vis-à-vis en mêlée m'avait déjà mis le doigt dans l'œil une fois et quand il a essayé à nouveau, je l'ai mordu. C'est à ce moment là, en voyant son doigt ensanglanté, qu'un supporter m'a crié : « On va te renvoyer dans ton pays par le premier avion ! ». Et là, le joueur a ajouté : « Et je me demande s'il n'a pas le sida… ». Des propos qui poussèrent Joël Tomakpleconou à enlever son maillot et à quitter le terrain pendant que l'arbitre de la rencontre sanctionnait le joueur genlissien d'un carton jaune. Le règlement stipule, lui, qu'en cas de propos racistes, leur auteur doit se voir administrer un carton rouge et la partie doit être définitivement arrêtée. « Après, je suis revenu sur ma décision d'abandonner le match et j'ai repris ma place pour ne pas pénaliser mon équipe, assure le joueur lédonien. Je ne sais pas ce qu'il a entendu, mais je n'en veux pas à l'arbitre qui était sans doute dépassé, vu le climat qui régnait dans ce match. Mais j'ai trouvé incroyable que, personne à Genlis, joueurs ou staff, ne réagisse après des propos pareils ! Je reconnais que j'ai mordu mon vis-à-vis en mêlée et je suis prêt à en assumer les conséquences. Mais ça ne justifie pas ce qui s'est passé ensuite ».

« Je pensais naïvement que ma naturalisation était un bouclier »

La rencontre terminée, Joël Tomakpleconou encore sous le coup, décidait de boycotter la traditionnelle réception d'après-match, imité par ses coéquipiers en signe de solidarité. « Je me suis ensuite demandé toute la semaine s'il fallait aller plus loin dans cette affaire. Je ne voulais pas réagir à chaud. Et puis vendredi, j'ai décidé de porter plainte contre le joueur de Genlis et de saisir la Halde [Haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité]. Je suis le premier à dire qu'il ne faut pas faire d'amalgame, que tout le monde n'est pas comme ça, mais je ne pensais pas que ça arriverait sur un terrain de rugby… Et puis, j'ai obtenu ma naturalisation française il y a peu de temps et je pensais naïvement que c'était un bouclier qui me protégeait de tout ça. A Genlis, j'ai été rattrapé par la réalité et ça m'a fait très mal », concède le joueur encore très marqué, près d'une semaine après les faits, malgré le soutien de ses coéquipiers. « Je ne peux pas croire que ce genre de comportement est une fatalité. Je suis arrivé en France en 2002 et c'est à Pimorin, qui est pourtant un tout petit village, qu'on m'a donné ma chance. Là-bas, je n'ai jamais rencontré le racisme. C'est pour ces gens-là qui m'ont accueilli que je ne veux pas laisser passer ça. Si je ne faisais rien, ça voudrait dire que je ne fais aucune différence entre ceux qui sont racistes et ceux qui ne le sont pas. On est en 2009, il faut que ça cesse ».

Joël Tomakpleconou a reçu le soutien de son club dont le président, Jean-Pierre Badin, a adressé un courrier au Comité territorial de Franche-Comté. Le Comité du Jura, par l'intermédiaire de Pascal Mazué, lui a également apporté son concours.

Stéphane Cléau

Le club de Genlis s'interroge

S'ils se disent étonnés de l'intention affichée par Joël Tomakpleconou de déposer plainte, les dirigeants de Genlis (Côte-d'Or) n'ont pas attendu avant de tenter de faire la lumière sur ce début de rencontre houleux. « Dès la fin de la partie, on a été voir l'arbitre, sans les joueurs, pour comprendre ce qui s'était passé, assure le président Marc Charpentier. S'il a bien entendu notre joueur dire au Lédonien : « Je me demande s'il n'a pas le sida », ce qui peut se dire indépendamment de la couleur de peau de celui auquel ça s'adresse, il confirme qu'aucun propos raciste n'a été tenu. Je ne dis pas que ce qu'a dit mon joueur est bien mais je rappelle quand même que juste avant ça, il avait été mordu jusqu'au nerf et qu'il a bien cru perdre son doigt. Il a été recousu jusqu'à 21 heures dimanche soir ! ».

Quant au spectateur qui a mis le feu aux poudres, le dirigeant côte-d'orien se veut catégorique. « J'étais placé à l'opposé, je n'ai donc rien entendu. Mais si un supporter a déconné, il faut qu'on le retrouve et qu'on l'exclue. C'est pour ça que j'aurais préféré, qu'au lieu de s'enfermer dans sa bulle, le joueur de Lons vienne nous voir et nous aide à l'identifier. Mais dire que notre joueur est raciste, c'est difficile à admettre : on le surnomme Mouloud et c'est un ancien auquel on n'a jamais rien eu à reprocher. J'en arrive à me demander si, en voyant la gravité de la blessure qu'il avait occasionnée, le Lédonien n'a pas cherché à faire diversion… ».

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