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lundi 2 novembre 2009

[EXPULSIONS] Coût de 533 millions d'euros pour 2008 selon la CIMADE (Le Figaro)

Le centre de rétention administrative de Metz Queleu.
Le centre de rétention administrative de Metz Queleu.
La Cimade, association d'aide aux migrants, dénonce le coût élevé des expulsions - 533 millions d'euros pour 2008 - et le «caractère opaque» de leur poids budgétaire. Eric Besson s'insurge et avance un total deux fois moindre. D'où proviennent ces différences ? Explications.
(Source : Le Figaro)

Combien coûtent les expulsions d'étrangers en situation irrégulière ? C'est sous ce nouvel angle d'attaque que le Cimade, seule organisation habilitée à intervenir dans des Centres de rétention administrative (CRA) interpelle les pouvoirs publics dans son rapport annuel, publié jeudi. «Le gouvernement mène depuis plusieurs années une politique de communication débridée sur les chiffres des expulsions mais reste d'une totale opacité sur leur poids budgétaire», dénonce Damien Nantes, l'un des responsables. L'organisation avance un coût global de 533 millions d'euros, soit 27.000 euros pour chacune des 19.800 expulsions de 2008.

Faux, rétorque Eric Besson, qui réfute toute opacité : il rappelle qu'il a commandé en juin un rapport à l'Inspection générale de l'administration (IGA), qui a établi le chiffre de 232 millions d'euros, soit 12.000 euros par expulsion. Un rapport qu'il affirme avoir transmis le 23 octobre aux présidents des commissions des Finances de l'Assemblée nationale et du Sénat. Entre les chiffres du ministère et ceux de la Cimade, une différence de 300 millions d'euros. Qui dit vrai ? Comment sont effectués les calculs ?

«Une politique coûteuse»

Dans les 533 millions d'euros avancés par la Cimade, qui se fonde sur un rapport de la commission des finances du Sénat remis fin 2008 par le sénateur Pierre Bernard-Reymond, sont pris en compte trois dépenses. Premièrement, le coût de garde et d'escorte des personnes retenues dans les CRA, ainsi que leur coût de fonctionnement (entretien, électricité). L'Etat consacre pour ce faire 394 millions d'euros par an : 60 millions pour les centres gérés par la gendarmerie, et 334 pour ceux gérés par la police.

S'ajoutent à cela, toujours selon le même rapport, 80,8 millions dans le budget du ministère de l'Immigration, pour les «dépenses de fonctionnement». Soit 28,8 pour les frais de restauration et blanchisserie des migrants, 42 millions pour leur expulsion elle-même (billets d'avion, de train ou de bateau) et 15 millions pour leur prise en charge sanitaire et sociale ainsi que l'aide à l'exercice de leurs droits.

Enfin, la Cimade ajoute à ces chiffres le coût d'investissement dans la construction de nouveaux CRA et l'agrandissement d'anciens, en se fondant pour cela sur les chiffres de la Cour des comptes. Un plan triennal entre 2006 et 2008 a entraîné la dépense de 174 millions d'euros. La Cimade a donc divisé ce chiffre par trois pour avoir la somme sur un an, soit 58 millions d'euros.

Voilà pour les 533 millions d'euros, une politique «coûteuse», résume la Cimade, qui précise que certains frais n'ont pas pu être évalués comme ceux liés au fonctionnement des services des préfectures ou au coût des contentieux liés à la rétention.

Investissement dans de nouveaux centres

Quelles sont les différences avec les chiffres de l'IGA et du ministère de l'Immigration ? Dans le détail, celui-ci avance un chiffre beaucoup moins élevé concernant les coûts du personnel encadrant les centres et les coûts d'entretien, soit 172 millions d'euros, au lieu des 394 de la Cimade. «Un montant très étonnant», pour Damien Nantes, qui rappelle que les chiffres du Sénat se fondent eux-mêmes sur des sources officielles de la gendarmerie. Le ministère, contacté par lefigaro.fr, n'est pas en mesure d'expliciter ses chiffres. Autre différence, le ministère avance aussi un coût un peu moindre pour les dépenses de billetterie et d'alimentation : 60 millions d'euros, au lieu de 80 millions.

Enfin, autre différence notable de calcul, le chiffre du ministère ne comprend pas le coût des investissements dans de nouveaux CRA. «Ce n'est pas logique de le prendre en compte, ce n'est pas le même type de charge», se défend-il. De plus, c'est un coût qui est amorti sur plusieurs années.» Le rapport du Sénat, cité par la Cimade, ne le prenait pas en compte non plus dans son calcul. Il parvenait quand même à un chiffre plus élevé que celui du ministère : 415,2 millions d'euros.

Quid du maintien des sans-papiers en France ?

Qu'en est-il, inversement, du coût de maintien des étrangers en situation irrégulière sur le territoire ? Sur la demande du ministère, l'IGA a engagé des travaux sur ce thème. Le coût le plus notable est celui des dépenses d'aide médicale d'Etat et d'hébergement d'urgence : 490 millions d'euros par an pour les 185.000 ressortissants étrangers en situation irrégulière bénéficiaires. Maintenir des migrants sur le territoire coûterait donc moins cher que de les expulser, si on prend le chiffre de 533 millions d'euros calculé par la Cimade. Mais cela coûterait plus cher, selon celui du ministère.

L'association balaye de toute façon ce genre de considération, et déplore un traitement de l'immigration «sous un angle uniquement négatif». «On ne se demande pas, au contraire, ce que rapporte le maintien des étrangers sur le territoire, notamment en terme de main d'œuvre» souligne Damien Nantes, qui affirme que «la plupart des entreprises de restauration fonctionne avec des étrangers en situation irrégulière.»

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