Le "boulanger d'Abidjan"... Laurent Gbagbo doit ce sobriquet mi-goguenard, mi-admiratif, à son aptitude légendaire à rouler son monde dans la farine. Mais en décrétant, le vendredi 12 février, la dissolution du gouvernement et de la Commission électorale indépendante (CEI), le président ivoirien démontre qu'il se sent plus à l'aise encore sur un ring de boxe que devant un four à pains. De préférence dans le rôle du puncheur, et quitte à cogner sous la ceinture. Le quotidien Soir-Info voit d'ailleurs dans cet oukase un "uppercut" infligé à l'opposition.
Sonnée, celle-ci hurle au "coup d'Etat" et à la dérive dictatoriale. Ainsi, le Rassemblement des houphouétistes -référence au défunt Félix Houphouët-Boigny- pour la démocratie et la paix, alliance hétéroclite animée par l'ancien président Henri Konan Bédié et l'ex-Premier ministre Alassane Ouattara, "ne reconnaît plus M. Laurent Gbagbo comme chef d'Etat." Nul doute qu'elle reconnaît bien en revanche le mélange de brutalité et d'habileté tactique du stratège prêt à tout pour retarder une échéance électorale différée à six reprises depuis 2005, terme théorique du mandat présidentiel. Du moins aussi longtemps qu'il n'aura pas acquis la certitude absolue de rafler la mise.
Elections à l'automne?
Car ce énième coup de Jarnac a pour effet mécanique de rendre caduque la dernière mouture en date du calendrier politique: officiellement, l'appel aux urnes devait sonner "fin-février ou début mars". Mars, soit, mais de quelle année? Instruit par l'expérience, le Conseil de sécurité des Nations unies réclame la tenue du scrutin avant juin prochain. On prend les paris: au mieux, les isoloirs sortiront des remises à l'automne. En tout cas après les célébrations du cinquantenaire de l'indépendance, qui s'annoncent aussi fastueuses que patriotiques.
Fils naturel du couple formé par Machiavel et Gengis Khan, Gbagbo aurait-il déchiré la partition de Ouagadougou? A-t-il choisi de réduire en confettis cet accord censé mettre un terme à la crise aiguë consécutive à la tentative avortée de prise du pouvoir par les insurgés nordistes des Forces Nouvelles? Pas vraiment. Lui va jusqu'à soutenir, avec son culot proverbial, être mû par le seul souci de "sauver" un pacte que "l'on veut saboter." Disons plutôt que l'ancien prof d'histoire socialisant prétend imposer sa lecture d'un document signé en 2007 sous l'égide du médiateur Blaise Compaoré, son homologue burkinabé.
L'épisode de la double dissolution n'aura surpris que les candides. Il survient au moment d'aborder le noyau dur du litige entre le boulanger-boxeur et l'opposition: la composition des listes électorales définitives. La séquence des événements s'avère à cet égard éloquente. Le 9 janvier, Laurent Gbagbo, bientôt imité par la justice, dénonce les "fraudes" commises par Robert Beugré Mambé, président de la CEI issu des rangs de l'opposition. En clair, il l'accuse d'avoir inscrit en catimini 429 000 électeurs fictifs. Début février, l'enjeu, ô combien crucial, des radiations d'étrangers supposés déclenche de violentes échauffourées, notamment sur le seuil du tribunal de Man (ouest), comme à Katiola (centre) et Divo (centre-ouest). Maître du jeu et du temps, le sortant peut dès lors, en populiste madré, stigmatiser les "attaques contre des symboles de l'Etat" et voler à la rescousse d'un "processus de paix pris en otage par des partis politiques." En fait de boulange, c'est peut-être un boulangisme à l'ivoirienne qu'ébauche Gbagbo l'historien.
Fidèle à ses habitudes, il piège ainsi partenaires et adversaires: l'opposition, bien sûr, la communauté internationale, mais aussi le "facilitateur" Compaoré et son Premier ministre Guillaume Soro, chef de l'ex-rébellion des Forces nouvelles. Propulsé à la primature par la grâce des accords de Ouaga, et maintenu dans son inconfortable fauteuil, celui-ci se voit sommé d'imaginer un "nouveau format" pour la défunte CEI et de composer sans délai un cabinet restreint. Cabinet au sein duquel, sauf à se discréditer, les mouvements réunis dans le RHDP refuseront de siéger. Et qui sera composé pour l'essentiel de technocrates ou -variante envisagée- de caciques du Front populaire ivoirien (FPI), le parti présidentiel, flanqués de fidèles de Soro.
"Un seul et unique capitaine à bord du navire Ivoire", claironnait le 13 février Fraternité-Matin. Un seul capitaine, mais combien de récifs à l'horizon? Et combien de galériens dans les cales, las de ramer en râlant?
vous raconter des conneries que nous ivoiriens ignorons.à quand le changement? je ne sais pas trop de votre coté mais une est que ici les choses bougent et surtout vont dans le bon sens.si cela vous enerve tant,et bien c'est que l'eldorado perd de la verdure.merci et bonne nuit
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