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lundi 22 février 2010

[MEDIA] France 24, média non grata en Côte d'Ivoire (Libération)

Quand cela va mal en Côte d'Ivoire, les médias trinquent, les locaux mais aussi ceux de l'ancienne puissance coloniale. Jadis, c'était RFI (Radio France internationale) qui subissait les foudres du pouvoir. Le régime de Laurent Gbagbo, relayé par la galaxie "patriotique", stigmatisait ad nauseam ces médias "vendus à Chirac", n'hésitant pas à donner des noms, et même des adresses de certains correspondants installés sur place.

Les temps ont changé, et c'est désormais France 24 qui est visée en priorité. Ce matin, Abidjan a annoncé la suspension de la diffusion de la chaîne de télévision dirigée par le tandem Alain de Pouzilhac-Christine Ockrent. Raison invoquée par le Conseil national de la communication audiovisuelle (CNCA), le CSA local: "Traitement non professionnel de l'information" concernant "l'actualité politique" récente dans le pays. Une actualité plutôt chargée: depuis que le président Laurent Gbagbo a dissous, le 12 février, le gouvernement et la Commission électorale, repoussant sine die l'élection présidentielle, le pays est en ébullition. Des manifestations ont lieu tous les jours, et cinq personnes ont été tuées à Gagnoa, dans le fief même de Laurent Gbagbo.

Sur son site, France 24 dit "regretter" cette décision, qu'elle juge "injustifiée". La chaîne espère une levée de cette mesure lors de la prochaine réunion du CNSA, ce mercredi. Au siège, à Paris, l'incompréhension domine. "On a toujours eu un souci de couverture équilibrée dans cette crise", explique Albert Ripamonti, directeur adjoint de la rédaction. Ce matin, sur l'antenne, on a eu l'ancien président et actuel opposant Henri Konan Bédié et le porte-parole de Gbagbo, Gervais Coulibaly."

France 24, qui emploie plusieurs journalistes sur place, joue la prudence. Tout le monde a en mémoire le meurtre du journaliste de RFI, Jean Hélène, tué à bout portant par un policier à Abidjan, en octobre 2003. Dans un climat de haine entretenu au plus haut sommet de l'Etat,ce policier, qui fut condamné à 17 ans de prison, avait fini par voir la radio française comme l'un des responsables du conflit en Côte d'Ivoire.

Quelques mois plus tard, c'est le journaliste franco-canadien Guy-André Kieffer qui disparaissait, enlevé en plein jour à Abidjan par des hommes armés. On n'a jamais retrouvé son corps. La suspension de France 24 est un signe de plus de la dégradation actuelle du climat en Côte d'Ivoire. Un signe très inquiétant.

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